Contestation de l'administration de la communauté
- lucien renoir
- 14 janv. 2024
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Contexte (1777)
Dans le terroir cannois, les journaliers agricoles ont développé une pratique très mal perçue par la classe bourgeoise de la population. En plus de leurs gages, ils réclament aux propriétaires les employant d'être nourris (appelé l'ordinaire).
Une délibération du 18 mars 1777, nous montre l'ampleur prise par cette affaire.
Il a été représenté par MM. les maire et consuls que pour faire cesser un usage abusif qui s’était introduit dans le lieu au sujet de l’ordinaire que les paysans voulaient prétendre en sus de leur journée, le conseil de la communauté assemblé le 16 février dernier prit une délibération tendant à faire dire et ordonner par la cour qu’inhibition et défenses seraient faites à tous les habitants du dit lieu et son terroir d’accorder en sus de la journée convenue ce qu’on appelle l’ordinaire aux paysans et travailleurs qui seraient par eux employés au défrichement, culture et autres travaux de la terre à peine de telle amende que la cour arbitrerait, tant contre le propriétaire que contre l’ouvrier, pour chaque contravention applicable, moitié à l’hôpital saint Jacques du dit lieu, et l’autre moitié en faveur du dénonciateur, et en cas de récidive, d’en être informé, en exécution de laquelle délibération, ayant été présenté requête à la cour de parlement, est intervenu arrêt le 25 février dernier qui homologue la dite délibération, ce qui prouve la justice des inhibitions et défenses requises au préjudice desquelles quelques particuliers du lieu ayant contrevenu au dit arrêt, les sieurs maire et consuls ont été nécessités de leur faire payer l’amende de 10 livres qu’il prononce contre les contrevenants. Cet arrêt salutaire à l’habitation n’ayant pas plu à tout le monde , il est revenu aux sieurs maire et consuls qu’un nombre de particuliers de ce lieu ont vomi mille injures contre eux, tant dans les places publiques, cabarets et campagnes, disant entre autres que le sieur Demarest, maire mériterait d’être roué, pendu et lapidé , que les manouvriers qu’il emploierait à la culture de ses biens devraient couper ses vignes, et qu’on se moquait des consuls comme de l’arrêt, qu’ils étaient des grugeurs de la communauté et des biens des pauvres, et que malgré eux, ils donneraient l’ordinaire aux paysans. Toutes ces raisons et autres méritent sans doute d’être réprimées. Il est venu de plus venu à la connaissance des sieurs proposants que le jour d’hier 17 du courant, Raphel Dalmus, patron de bâtiments de mer étant à la marine , en parlant de l’arrêt dont il s’agit et des inhibitions qu’il prononce, le dit Dalmus dit à haute voix « je me fous en passant tout outre des consuls. Ils sont des foutus visages. Que prétendent ils faire ? Ces gens foutres, ne savent-ils pas que j’ai de l’argent, que nous les mènerons plus loin qu’ils ne voudront aller. Ces propos et bien d’autres qui échappèrent au dit Dalmus dans une place publique, proférés à haute voix et d’un ton de mépris suivis de gestes menaçants, présentent un caractère et une humeur indépendante, et un vrai mépris de l’arrêt de la cour, et des consuls. Et d’autant qu’il s’agit ici d’arrêter les progrès que pourraient faire ces propos du dit Dalmus et autres quidams, et qu’on le doit à l’honneur du chaperon, le conseil est requis de délibérer.
Sur la proposition, les assemblés, après en avoir entendu la lecture, ont unanimement délibéré à l’exception des sieurs Jean Gazan, négociant, Pierre Merle et Antoine Labatut, qui ont abstenu, le dernier comme parent de Raphel Dalmus, et donné pouvoir aux sieurs maire et consuls de faire consulter 2 avocats de la ville d’Aix pour savoir la route que la communauté a, à tenir contre le dit Raphel Dalmus et autres quidams qui peuvent avoir proféré les injures contenues dans la proposition, et autres, à la charge par les sieurs maire et consuls de rapporter la dite consultation à un autre conseil de la communauté, et avec pouvoir mandat sur le trésorier de la communauté des honoraires de la dite consultation.
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